RENCONTRE

avec


David SIRE



Dessin : Baudoin 
 

Est-il chanteur-auteur-compositeur, poète de la rencontre ?
Est-il troubadour moderne ou bien alchimiste des mots ?
On le dit aussi "Bidulosophe"...
En fait , ce joyeux SIRE ne serait-il pas un mélange de tout cela ?
Ce qui est certain , c'est que son dernier album " Je est un nous" vient de recevoir le " Coup de coeur de l'Académie Charles CROS "...une référence dans le milieu !
Et comme Michel de 3-2-1-chansons a eu, lui aussi, un véritable coup de coeur en écoutant l'artiste, il lui a donc posé quelques questions ...

David , c'est surtout à l'auteur que je m'adresse aujourd'hui ...

Te souviens-tu de l'écriture de ta première chanson ?

J’avais une vingtaine d’année. Je venais de traverser les Pyrénées d’Ouest en Est, j’ai tenté de résumer ces quarante jours funambules par quelques strophes sans doute un peu maladroites. Mais sincères. Après, j’ai compris qu’il fallait se mettre au travail.

Comment pratiques-tu.......as-tu une méthode de travail ?

L’infusion… Lente, itinérante, imprévisible. Un vagabondage en forme d’attente, jusqu’à ce moment un peu miraculeux où « quelque chose prend ». Peut-être ce qu’on appelle le réel. En tout cas, sans cette étincelle qui ne m’appartient pas, sans cette rencontre qui allume l’écriture, la chanson ne sera pas vivante. Après, une fois trouvée ce seuil, se mettre à l’ouvrage, à l’établi, façonner la petite musique de la poésie.

La page blanche te hante t-elle ?

Non. Elle me rend parfois un peu triste. Mais j’ai un grand catalyseur de joie : le mouvement. Alors quand ça sèche, je pars en voyage, je danse, je fais une tournée à vélo…

Ecrire est-il vital pour toi?

Oui, mais ce n’est pas tant l’acte d’écrire. Il y a une condition pour que la rivière du stylo coule : écouter. Sans écoute, point d’écrit. Donc, ce qui est vital c’est plutôt d’avoir des oreilles et un cœur ouverts, de laisser le nombril et la peur de côté, bref, d’être porte battante et de laisser faire le vent.

Les périodes d'écritures sont-elles exaltantes ou déprimantes ?

Venteuses. Jubilatoires. C’est comme un galop. Mais c’est finalement assez rare. Les mystiques chrétiens (j’ai beaucoup fréquenté Sainte Thérèse d’Avila à une certaines époque) parlaient de ce yo-yo inévitable et très déséquilibré entre de longues périodes d’ascèse (l’infusion) et de très courtes périodes d’extase (quand ça prend, quand le réel ouvre la porte). Il m’a juste fallu accepter que le mouvement de balancier n’était pas symétrique.

Traverser la France en vélo pour mieux rencontrer les gens , se nourrir de tout ça pour écrire , c'est peu commun pour un chanteur ,,,,,ça demande un certain courage , beaucoup d' audace !

Concrètement comment se déroulaient tes étapes , tout était bien organisé ou au contraire c'était l'aventure ?

Courage = cœur qui agit. Audace = passer la frontière de nos peurs qui radotent. Voyager = retrouver le battement, le mouvement même de la vie. Ces deux tournées ont effectivement été pour moi initiatiques, à un moment où je doutais de la possibilité de rester libre en faisant ce métier. Finalement, ça m’a littéralement remis en selle…

J’avais mis six mois à préparer tout cela. Les étapes étaient prévues, car il est doux et joyeux d’être attendu, par contre l’aventure était réelle, à chaque instant. Ce fut une belle expérience d’imprévisible. J’en ai gardé le goût et je crois que ces tournées ont largement parfumé mes recherches depuis.

Si tu devais donner un seul conseil à un débutant parolier , ce serait lequel?

D’abord, devenir intense.

Ta chanson préférée ?

La prière de Georges Brassens.

Parle nous un peu de la « Bidulosophie » ? Te considères-tu comme un chanteur-philosophe ?

Oui ! S’être inventé un métier, c’est très gai. Etre bidulosophe, ou plutôt, le devenir jour après jour, c’est être arpenteur, pétrir et partager cette conviction que « les autres, c’est ça la vie », déplier les paroles enfermées, allumer des cercles bidule et inventer des relations collectives dans lesquelles la poésie devient l’autre nom de la liberté. Début mai, j’organise dans les Vosges les premières assises mondiales de la bidulosophie. Un petit lien vous en dira plus : http://www.davidsire.com/wp-content/uploads/2016/04/tract-assises-bidulosophie2016.pdf

Que penses-tu de la mise à l’écart  « médiatique » d’ACI comme toi ou d’autres de tes collègues ?

Je pense que c’est une conséquence de la paresse, cette foutue paresse qui éteint les cœurs, le désir brut, la liberté d’avant qu’on la prononce. Mais face à ce rouleau compresseur qui voudrait niveler l’incommensurable diversité, il reste la contagion poétique. La force du brin d’herbe qui finit par percer le bitume.

Quel regard poses-tu sur la chanson française actuelle, son évolution , son avenir ?

Je sens, j’entends beaucoup de battement, de duende, il y a des tambours qui montent et reviennent, inlassablement. On ne peut pas éteindre la battement de la vie. Donc ça va continuer de chanter, de marteler, de réveiller. Certaines chansons, certaines voix nous invitent à reconnecter l’art et la vie, à déposer les peaux mortes et tristes de la société du spectacle. Je sens que ces chansons-là vont pousser de plus en plus fort. Là, oui, c’est vital. Et ce sera viral, je l’espère.

Voudrais-tu nous dire quelques mots sur la « tournée des cheminées des copains »et de ce rapport particulier avec le feu ?

Le feu c’est mon copain. Depuis tout petit. A chaque fois, c’est une retrouvaille. Un silence profond, dense, une méditation. Le feu allume un cercle autour de lui. En chaque point de ce cercle, on se retrouve égal. Le feu ouvre un puit dans le regard des hommes, c’est une porte ouverte sur le pré-individuel, sur ce merveilleux substrat d’avant les individuations, et c’est cette matière qui me fait vivre et espérer. Alors oui, j’aime allumer un petit feu et inviter des copains autour.

Pour terminer, présente nous ton dernier album : « Je est un nous » , C'est un album qui prône le partage et nous parle de rencontres ! Quelle mission voudrais-tu que tes chansons aient auprès des gens ?

Je préfère inviter chacun à l’écouter plutôt que de maladroitement paraphraser ce que j’ai essayé de mettre dans cet album. J’aimerais que ces chansons donnent envie de faire du feu. Qu’elles réchauffent et mettent en route.

Y a t-il une question à laquelle tu aurais aimé répondre ....et que je ne t'ai pas posée ?

Qu’est-ce qu’on attend pour augmenter la joie ?

.Merci David pour ta disponibilité .

 
 



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