Des chansons à texte, pas à message, mâtinées d’humour. Céline joue avec les mots qui chantent à nos oreilles… »
L’Union
Depuis quand écris-tu et qui t'a donné l'envie d'écrire ?
Depuis que je sais écrire, je crois…. A Paris, on va pas jouer dehors, parce que dehors, c’est dangereux , les copains souvent habitent loin. Alors, comme j’étais seule, j’écrivais… des romans (de 3 pages , au moins !), des poèmes. Une façon de recréer le monde entre les quatre murs des appartements parisiens, une manière aussi de parler à des milliers de copains alors qu’on est tout seul.
Comment pratiques-tu.......as-tu une méthode de travail ?
Il y a parfois un fragment de phrase qui me hante, pour son rythme ou son image ou pour les deux. Autour de ces quelques mots, j’agrippe un texte. Comme un oiseau fait un nid autour d’une première brindille, je tricote un texte autour d’un noyau de mots. Je sens que si un petit bout de phrase m’arrête, c’est qu’il recèle beaucoup de choses insoupçonnées et que je dois prendre le temps d’écouter tout ce qu’il veut dire…
Ou trouves-tu ton inspiration et quels sont tes thèmes préférés ?
Mon inspiration, ce n’est pas moi qui la trouve, c’est elle qui vient me chercher… C’est ce que je disais plus haut : quand un détail de notre vie ou une phrase m’arrête, j’ai vraiment l’impression que c’est elle qui s’adresse à moi et qui me dit « il faut que tu racontes » Ce n’est ni de la prétention, ni du mysticisme (surtout pas !), cela ressemble à un jeu de décryptage. Prenons un exemple tout simple : les éternelles discussions dans les transports sur « être ou ne pas être dans le sens de la marche ». Il s’est trouvé qu’un jour, j’y ai été plus sensible qu’un autre -pourquoi ? j’en sais rien – et je me suis dit : Céline, il faut que tu évoques ce que ça représente : ETRE ou NE PAS ETRE dans le sens de la marche, tu dois amener ce problème au grand jour, il est injuste qu’il reste au rang des lieux communs et des banalités !…. Je me suis amusée à écrire la chanson et je m’amuse aussi beaucoup à l’interpréter en scène. Je plaisante et en même temps, je ne plaisante pas….
Est-ce que ta gomme est un instrument utile pour écrire ?
Bien sûr et en plus, il faut une importante pile de feuilles de papiers (ce qui heurte ma conscience écologique, donc j’essaie quand même d’être raisonnable)… C’est beau de pouvoir repartir du blanc, du rien, de zéro… (même si on est toujours chargé des premiers essais) et de recommencer, de reprendre les mots encore et encore, ce n’est que la destinée humaine que l’on rejoue.
As-tu un ordre bien défini , paroles puis musique ? La rythmique et la mélodie te « trottent »-elles déjà dans la tête ?
Ca dépend. J’aime bien quand la musique que je confie à des compositeurs est un partenaire réel. Lorsque le texte est mis en musique, il est fréquent que je le modifie. Ca va jusqu’à m’engager à réécrire un refrain ou à supprimer un couplet.
Ecrire est-il vital pour toi?
Je retournerai la formule : c’est parce que je sens la vie, que je la ressens autour de moi, que j’écris. Les périodes d'écritures sont-elles éxaltantes ou déprimantes ?
Totalement exaltantes ! Même si on écrit des choses bancales, même si on rafistole des mots tout de guingois, quel bonheur, quelle chance a-t-on de pouvoir utiliser notre parole !
Si tu devais donner un seul conseil à un débutant parolier , ce serait lequel?
Dire quelque chose. Même si personne ne doit jamais le comprendre. Savoir soi-même ce que l’on a dit, et le défendre …
Ta chanson préférée ?
Il y en a beaucoup et tant mieux… On n’est pas monolithique, et on peut être sensible à des choses apparemment très diverses ! Au risque de ne pas être du tout musicalement correcte, j’avouerai que je demeure fascinée par la chanson populaire : « Aux marches du palais » ou « A la claire fontaine »… C’est de la mythologie à deux sous (quoique) et de la mélodie à trois notes mais ça coupe comme du diamant. Dans mon utopie personnelle, il y a comme but ultime de trouver un jour cette simplicité, cette force, cette acuité. Je ne demande pas grand chose : réussir un couplet, quatre vers, de cette intensité. C’est énorme. Toutes les gommes et la pâte à papier du monde n’y suffiront pas ! Y a t-il une question à la quelle tu aurais aimé(e) répondre et que je ne t'ai pas posée ?
Oui : quel est mon peintre préféré ? Ca n’a que l’apparence de la boutade, car ça n’en est pas une. J’aime bien le silence des œuvres picturales. J’aime bien suivre celui qui a réussi à faire tenir sa vie, son intelligence, sa vision toute entière du monde dans une œuvre plane, immobile et muette ! Et j’aime particulièrement Nicolas de Stael et Gaston Chaissac (aux antipodes l’un de l’autre !).